À rebours «des colonisations idéologiques» et d’une certaine «uniformisation de l’éducation» dans un monde globalisé, le Souverain pontife a plaidé ce samedi pour développer «l’art de la curiosité» dans l’enseignement catholique. François recevait en audience les 250 participants au symposium «Service-Learning et pacte éducatif global» en salle Clémentine du Palais apostolique.
Citant un extrait du film culte «Le Cercle des poètes disparus» où le professeur de littérature invite les élèves à se lever et à regarder la classe d’un autre point de vue, le Pape a rappelé que l’éducation n’est pas seulement la transmission d’un contenu, mais aussi «la transformation de la vie». Par celle-ci, il ne s’agit pas seulement de répéter des formules «comme des perroquets», mais d’apprendre à voir la complexité du monde.
L’uniformité éducative masque un conditionnement idéologique
Une pédagogie promue par Jésus à travers les paraboles, dans lesquelles Dieu ne parle pas «de manière abstraite» à destination d’une «élite» quelconque, mais de façon «simple et accessible» à tous. Or, François note que la mondialisation actuelle comporte un risque pour l’éducation: celui de l’uniformisation, certains programmes étant souvent soumis à des intérêts politiques et économiques. «Cette uniformité cache des formes de conditionnement idéologique qui falsifient le travail de l’éducation, en en faisant un instrument à des fins bien différentes de la promotion de la dignité humaine et de la recherche de la vérité», dénonce le Pape, vilipendant les idéologies, toujours réductrices. «L’idéologie se rétracte toujours, elle ne permet pas de se développer. Elle rétrécit toujours».
L’humanisme de l’Évangile
Dans ce contexte, le Successeur de Pierre loue la méthode pédagogique du Service-learning, ou «apprentissage par le service» employée par le réseau Uniservitate, du Centro Latinoamericano de Aprendizaje y Servizio Solidario (CLAYSS), association argentine fondée en 2002. Ainsi la responsabilité communautaire des étudiants à travers des projets sociaux fait partie intégrante de leur parcours académique. Selon le Pape argentin, c’est ainsi que les établissements d’enseignement catholiques sont à la hauteur de leur titre. En effet, être «catholique» ne se limite pas à ajouter un adjectif honorifique à son nom, mais signifie un engagement à cultiver un style pédagogique distinctif et un enseignement cohérent avec les enseignements de l’Évangile. «Il ne s’agit pas d’une idéologie évangélique, mais de l’humanisme selon l’Évangile.»
François cite à nouveau les intentions du Pacte éducatif mondial qu’il promeut depuis 2019: «Un proverbe africain dit que pour éduquer un enfant, il faut tout un village; construisons donc un ‘’village de l’éducation’’, où nous pouvons partager l’engagement de promouvoir des relations humaines positives et culturellement valables». Et de plaider pour une alliance éducative favorisantle dialogue entre les religions et l’attention portée à la Maison commune. Sur la base de son exhortation apostolique Evangelii gaudium, le Pape leur rappelle combien «la réalité est supérieure à l’idée», et «le tout est supérieur à la partie».
Cultiver la curiosité des enfants
Deuxièmement, l’enseignement catholique doit promouvoir selon lui une «culture de la curiosité». «Ce qui n’est pas la même chose que la culture du bavardage, non, rien à voir», mais celle qui valorise l’art de poser des questions, semblable à l’âge enfantin «des pourquoi», assure François, exhortant à écouter et à apprendre à poser ces questions des enfants, «curieux dans le bon sens du terme». Le Pape, défenseur d’une éducation intégrale, leur a aussi souligné la nécessité de ne pas réduire la connaissance à la seule capacité de l’esprit, mais à la coupler «à la dextérité de mains industrieuses et la générosité d’un cœur passionné». Elle est un triple langage qui se parle avec l’esprit, avec le cœur et avec les mains. Et, conclut, le Pape, le cœur est le meilleur pacificateur contre l’ennemi des idéologies. «Les idéologies ne nous font pas grandir, quel que soit leur signe, elles sont l’ennemi de la maturation.»